Dans un article de février dernier, j’ai décrit le spectacle désolant pour la biodiversité d’une parcelle de bois exploitée sous le label « PEFC » qui veut « promouvoir la gestion durable de la forêt ». Après sept mois et une saison de pousse, je suis allé voir si la nature arrive à s’accommoder de ce désastre.
Des cicatrices encore profondes
Le matériel lourd utilisé pour couper et sortir le bois à une période de pluies abondantes a tellement labouré le sol par endroit que les ornières sont restées pratiquement telles quelles huit mois plus tard. Il est vrai que l’été particulièrement sec que nous venons de connaître a transformé la terre nue et malaxée par les chenilles en une croûte très dure.
Effet classique de la sécheresse sur un sol argileux, de profondes crevasses sont apparues qui témoignent de l’importance du manque d’eau. Pourtant ça et là quelques plantes pionnières comme les chardons ont réussi à s’installer. Plus surprenant, quelques jeunes chênes ont fait leur apparition, issus de glands qui ont eu la chance de ne pas être écrasés ou enfouis trop profondément.
Un avenir en marche
Dans les endroits par chance indemnes de tout passage de machine, la litière d’origine a été conservée. Privée de l’ombre des arbres, elle s’est desséchée en profondeur cet été. Je n’ai vu que quelques petits carabiques s’enfuir dans les endroits que j’ai remués par curiosité, et un seul grillon des bois. Comme elle ne sera pas alimentée par de nombreuses feuilles mortes cet automne, sa recolonisation par la faune du sol prendra probablement du temps.
Mais par sa seule présence, elle a permis l’apparition du futur bois dont profiteront peut-être mes petits et arrières-petits-enfants lors de leurs promenades dans un demi-siècle. A condition bien sûr qu’entre temps une nouvelle exploitation écologiquement labellisée promouvant la gestion durable ne vienne pas tout raser.
Le vert domine toujours
La capacité de cicatrisation du couvert végétal est impressionnante. Même après un traitement aussi traumatisant, même après une saison à la météo chaotique avec un printemps froid et humide suivi d’un été sec et chaud, quand je regarde la parcelle dans son ensemble et non plus dans le détail, le vert domine largement.
Cette résilience du petit bois est réconfortante, même si la biodiversité qui existait avant la coupe mettra du temps à se réinstaller, si elle y parvient. Les rares jeunes arbres épargnés grâce à leur souplesse qui les a fait plier et non casser au passage des engins, les souches non arrachées qui commencent à rejeter, les levées des glands et autres semences présents dans la terre, les plantes pionnières dont les graines sont arrivées par les airs, tout concourt à redonner à cette parcelle un aspect vivant. Pouvoir admirer cette pulsion de vie est le seul point positif que je vois à cette malheureuse expérience.
Delphine a dit:
Un peu d’espoir quand même ?
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vincentalbouy a dit:
Il y a toujours de l’espoir, Delphine, tant qu’il y a de la vie. Et les grosses machines ont bien écorché le terrain, mais elles ne l’ont pas totalement désertifié, loin de là ! Wait and see, comme disent nos amis anglais.
Vincent
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Alexandre a dit:
Bonjour,
J’ai l’impression que paradoxalement, des endroits de ce genre regorgent de vie. D’accord, il n’y a plus les grands arbres, mais pendant quelques années, il y aura d’abord les plantes annuelles et puis les vivaces et graminées qui finiront par dominer. Je suis persuadé que sur ce terrain, on pourra observer des plantes devenues rares comme les fameux pavots (coquelicots et autres…). Les petits chênes mettront du temps pour grandir, ça c’est certain, mais lentement mais surement, la nature reprendra ses droits. Peut-être que cet endroit accueillera quelques flaques d’eau aussi intéressantes pour une foule de petits animaux.
Il faut juste espérer qu’on laisse cet endroit « bien tranquille », mais ça, c’est une autre histoire…
Restons positifs !
Bien à vous.
Alexandre
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vincentalbouy a dit:
Bonjour Alexandre,
Oui, restons positif, cette coupe à blanc a remis les compteurs à zéro et diverses espèces pionnières pourront s’exprimer durant quelques années. Mais ce petit avantage est malheureusement bien loin de compenser les gros inconvénients de ce genre de « gestion durable » des milieux boisés.
Cordialement
Vincent
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